Πέμπτη 15 Ιουλίου 2010

Prolégomènes à une théorie cosmosystémique. L’approche cosmosystémique de l’histoire et l’hellénisme










Georges Contogeorgis

Prolégomènes à une théorie cosmosystémique.

L’approche cosmosystémique de l’histoire et l’hellénisme[1]

1. La base cosmothéorique de la modernité

Le problème que soulève l’approche du devenir historique de l’être humain réside essentiellement dans l’absence d’un «argument» qui prendrait en considération les paramètres fondamentaux qui le constituent et lui confèrent sa cohésion en tant qu’universalité. La modernité, admirative devant les réalisations liées à l’édification de l’anthropocentrisme à grande échelle cosmosystémique, mais peu préparée à affronter le monde avec suffisamment de maturité gnoséologique et méthodologique, a choisi de promouvoir son paradigme en «mesure» et «modèle» de la vie humaine. Ainsi n’a-t-elle pas hésité à conclure que l’évolution, en tant que développement anthropocentrique, s’arrêtait à son propre acquis, exempté de ce fait de toute expérimentation comparative avec le passé.

Avec cette constante pour axe directeur, l’approche du devenir social suit forcément les éclaircissements fragmentaires ou partiels des domaines de la science qui prétendent l’étudier (la sociologie, la politique, l’économie, le droit, etc.), étudier ses réalisations événementielles ou, enfin, d’autres de ses dimensions selon une dominante thématique (la religion par exemple, ou le «capitalisme», la «lutte sociale», etc.), géopolitique (la Méditerranée, l’Asie, etc.) ou spatio-temporelle (le Moyen Âge, etc.).

Ce qui distingue toutes ces «optiques» de l’histoire, c’est l’absence de démarche réellement globale – même si presque toutes les écoles de pensée prétendent en posséder une – et, partant, l’absence de synthèse du devenir social sous l’angle de sa cause, c’est-à-dire de sa nature véritable. Et les difficultés sont encore accrues par l’obstination de la modernité à exclure la diachronie de la démarche comparative de la science sociale.

C’est ainsi que, pour elle, le temps est le temps global de l’histoire et non le temps du phénomène universel. Cela est confirmé par le choix d’une périodisation qui suit linéairement l’horizon historique, avec la «force» pour résultante. L’approche du devenir social en termes de «force» est assurément révélatrice du caractère primaire de l’optique et, par voie de conséquence, du caractère lacunaire de cette démarche qui juge l’évolution anthropocentrique sous l’angle de l’histoire. Le rattachement de la «force» au fait ethnique traduit également le choix fait par la modernité de projeter son acquis sur le passé comme argument interprétatif de l’évolution. Et finalement, même les écoles de pensée qui ont tenté de constituer le discours de l’histoire sur le critère du «mode de production», comme par exemple le marxisme et sa version post-marxiste ou libérale, n’ont su échapper à cette incongruité.

Ces écoles sont essentiellement axiologiques; elles se distinguent d’une vision linéaire de l’histoire qui aboutit à une justification globale de la modernité. C’est ainsi que le vécu historique d’une simple région géographique – le continent européen en l’occurrence – est-il élevé au rang de véhicule de l’évolution en général et, au-delà, de périodisation de l’humanité. Dans ce cadre, le progrès suit également une évolution linéaire et marque l’univers entier.

Le cas du schéma marxiste est hautement caractéristique. Karl Marx est le premier des modernes à avoir élaboré une cosmothéorie achevée du devenir social. Sa proposition part de l’hypothèse que le phénomène social reflète le «mode de production» qui domine à une époque donnée de l’histoire. La succession des différents «modes de production» détermine donc les stades successifs de l’évolution, qui correspondent à leur tour à autant de degrés du progrès.

Dans ce cadre, Marx distingue la société esclavagiste, la société féodale, la société capitaliste et la société socialiste. Dans son schéma, la société esclavagiste (et le «mode de production» qui y est attaché) est jugée antérieure et inférieure à la société féodale (et au «mode de production» qui l’accompagne), de même que la société capitaliste par rapport à la société socialiste.

Ce n’est pas ici le lieu de montrer en détail la fragilité de cet édifice marxiste et de ses effets collatéraux. Il suffit, à titre d’exemple, de signaler que dans son système de pensée, les sociétés de la cité grecque sont inférieures, en tant que stade esclavagiste, aux sociétés féodales du Moyen Âge européen; que la «société du travail» représente un stade supérieur à celui de la «société du loisir» ou, a fortiori, de la «société partenariale»; enfin, que «le travail marchandise» reflète un système de travail inférieur, car antérieur, au travail du servage du despotisme. Mais quant à comprendre comment un «mode de production» pré-féodal et, par conséquent, une forme antérieure d’organisation sociale telle celle de la cité-État ont pu créer une littérature scientifique et une pensée qu’il tient lui-même pour insurpassables, alors que la féodalité a produit une atmosphère intellectuellement asphyxiante, ce sont là des questions qui ne semblent pas arrêter Marx[2].

Pourtant, le principal problème du schéma marxiste est qu’il pèche logiquement. La société «esclavagiste» et la société féodale se distinguent quant au «mode de production». Toutefois, ledit mode de production «esclavagiste» – et plus précisément celui du «travail marchandise» – est non pas antérieur mais manifestement postérieur au «mode de production» féodal ou despotique. En tant que «mode de production», il s’inscrit dans le cosmosystème anthropocentrique à petite échelle et non dans le cosmosystème despotique comme le servage. De même, entre la société socialiste et la société capitaliste n’intervient pas un «mode de production» différent mais une organisation différente du même «mode de production». Leur différence est donc, sur ce point, morphologique et non pas typologique, indépendamment du fait que le cours de leur évolution se situe aux antipodes de celui que Marx avait imaginé. Le projet socialiste apparaît historiquement là où la transition du despotisme à l’anthropocentrisme s’avère sans issue, et précède donc, c’est-à-dire prépare en quelque sorte la transition capitaliste.

L’impasse de la vision cosmothéorique de Marx ressort également de sa certitude que l’abolition des classes conduirait à l’abolition de l’État et donc de la politique. Cette hypothèse surprend le grand penseur en flagrant délit d’ignorance, non seulement quant à la nature du phénomène politique en soi mais aussi quant au paradigme anthropocentrique majeur de la cité-État, dont a résulté l’abolition de l’État en tant que schéma institutionnel qui possédait la politique, sans abolition des classes. Il est évident que l’abolition de la politique ne va pas de pair avec l’abolition de l’État mais avec l’abolition de la société en tant qu’entité politéienne.

Les visions post-marxistes, libérales ou non, de l’histoire simplifient davantage encore la problématique. Elles distinguent en gros entre sociétés traditionnelles – dans lesquelles s’inscrivent les sociétés d’Afrique qu’a rencontrées la colonisation, les despotismes asiatiques historiques mais aussi les sociétés grecques des cités – et sociétés industrielles, c’est-à-dire les sociétés de l’époque moderne.

Dans la foulée, et en un sens pour lever cette problématique, est apparue dernièrement une nouvelle philosophie de l’histoire, fondée sur la «civilisation», qui pourtant est assimilée à la religion. La religion «décide» des perspectives de développement économique d’un pays, de sa capacité démocratique, etc. En même temps, ladite chrétienté occidentale (catholique et protestante) s’interpose comme «mesure» pour juger du fonds «progressiste» des autres religions ou même du dogme chrétien. En tout cas, et indépendamment des préférences géopolitiques de cette école, il est manifeste que le signifiant est transformé en signifié et même en cause efficiente du comportement humain[3].

2. La notion de cosmosystème. La liberté, enjeu de la typologie cosmosystémique, et les paramètres qui en constituent les fondements

Les remarques qui précèdent concernant la base cosmothéorique de la modernité donnent en tout cas une idée de l’impasse à laquelle elle mène. Du même coup, elles suggèrent la nécessité d’un paradigme cosmothéorique alternatif qui se concentrerait simultanément sur la diachronie et la synchronie de la vie sociale.

Cependant, toute tentative en ce sens exige au préalable que l’on précise la «mesure» sur la base de laquelle sera définie la nature fondamentale de l’homme, de la société ou d’un ensemble de formations sociales. À notre avis, cette «mesure», quand on se réfère aux sociétés humaines, ne peut être que la liberté. La liberté ou la non-liberté font la différence entre les hommes ou les sociétés.

Mais la liberté ne fait pas l’unanimité quant à sa nature ni, par conséquent, à son contenu et à ses dimensions. Néanmoins, nul ne saurait nier qu’elle suggère l’étendue de l’autonomie des êtres humains et des entités sociales. Par conséquent, elle s’oppose à l’hétéronomie, qui constitue la mesure de la dépendance sociale de l’homme. Cette dépendance peut être volontaire (résultat d’un «contrat», c’est-à-dire d’une concession) ou involontaire, totale ou partielle, et engager par conséquent l’ensemble ou simplement certains aspects de la vie humaine.

Bien que la modernité ait une position clairement différente, c’est un fait que la question de la concession volontaire ou non de l’autonomie concerne exclusivement la base légitimante de la relation sociale ou du système. Elle n’est pas liée à la liberté en soi qui, pour ce qui est de son existence, constitue une grandeur pragmatologique, c’est-à-dire mesurable.

L’autonomie (ou l’hétéronomie) partielle ou totale, quant à elle, détermine le type de système et ses aspects morphologiques plus achevés. Cela signifie que, de même que la relation volontaire d’hétéronomie ne constitue pas une liberté, de même l’individu social partiellement libre n’est pas globalement libre, puisque que le développement réel de sa liberté est en retrait par rapport à la liberté globale.

En ce sens, la substantiation des membres d’une société, avec pour signe la liberté individuelle, est la «mesure» pour classer cette société dans la catégorie de la liberté. Les sociétés constituées d’hommes libres au moins individuellement, nous les appelons anthropocentriques, tandis que celles dont les membres ne se substantialisent pas en prenant pour mesure la liberté, nous les appelons sociétés de sujets ou sociétés despotiques.

Prenant donc pour critère la liberté, nous sommes invités à classer le fait social dans son ensemble, le fait historique et le fait vécu. Les sociétés «anthropocentriques» composent une première globalité, les «sociétés de sujets» ou sociétés «despotiques» en constituent une autre. Chacune dispose d’une série de déterminants et de fondements communs qui la substantialisent, lui confèrent sa cohésion et dictent son évolution. À la globalité anthropocentrique correspond un type concret d’économie, de propriété, de structure et de relation sociales, de communication, de politique et d’idéologie, qui façonne ses paramètres. De même pour la globalité despotique. Nous définissons chacune de ces globalités comme un cosmosystème.

La genèse, l’existence et l’évolution de chacune de ces globalités, de chaque cosmosystème, n’est pas le résultat d’une conception ou d’une élaboration mentale ni d’une parthénogenèse. Elles dépendent de la nature et du développement de ses paramètres, qui se situent de ce fait au départ de son évolution.

Ces paramètres, et notamment leur influence sur la formation typologique du cosmosystème (anthropocentrique ou despotique) et par forme, dépendent finalement de l’échelle. C’est l’échelle qui définit le cadre du calibre social et par conséquent la base communicationnelle des paramètres du cosmosystème. Pour faire comprendre l’importance de l’échelle, notamment en ce qui concerne la transition anthropocentrique, l’exemple du paramètre économique est caractéristique: la société anthropocentrique à petite échelle, et donc le cosmosystème anthropocentrique homologue, présuppose une économie adaptée et à l’espèce du cosmosystème (en l’occurrence l’économie «chrématistique») et à son échelle. Mais l’économie de type anthropocentrique de la petite échelle cosmosystémique ne suffit pas à fonctionner comme paramètre capable de mobiliser sur la grande échelle cosmosystémique le devenir anthropocentrique.

Cette constatation montre clairement aussi que la démarche comparative doit confronter tant l’espèce (de type despotique ou anthropocentrique) du paramètre que l’échelle du cosmosystème. Par conséquent, pour rester sur le même exemple, l’économie de type anthropocentrique de la grande échelle cosmosystémique, comparée à son homologue sur la petite échelle, doit être évaluée non pas quantitativement comme une grandeur absolue, mais au regard de son poids spécifique dans le développement anthropocentrique de la société correspondante.

Il est à préciser également que la notion de cosmosystème ne coïncide pas obligatoirement avec l’œcuméné planétaire. Le cosmosystème ne désigne pas le système de l’ensemble de la Terre mais, comme nous l’avons vu, un ensemble concret, sur le plan cohésif et fonctionnel, d’entités sociales. Il se peut donc qu’il existe sur Terre un seul cosmosystème – une espèce de société – ou que les deux coexistent, le cosmosystème anthropocentrique et le cosmosystème despotique – chacun à un niveau différent d’évolution, sur l’ensemble de la Terre ou par région géographique. Le problème de la coexistence sur Terre des deux formes cosmosystémiques a en fait été posé par l’apparition du cosmosystème hellénique ou cosmosystème anthropocentrique à petite échelle. Mais il continué à se poser même après la montée du cosmosystème anthropocentrique à grande échelle, jusqu’à une époque récente.

Cela donne à comprendre que la notion de cosmosystème n’a rien à voir avec l’idée de «système mondial» (le «world system», par exemple) parfois utilisée de nos jours (voir Immanuel Wallerstein), ou avec d’autres symboles connexes (par exemple celui de la «mondialisation», du «village mondial», etc.) par lesquels on entreprend de rendre un aspect spécifique (par exemple l’économie) du cosmosystème anthropocentrique moderne[4]. Ceux qui étudient la modernité ne prétendent d’ailleurs pas proposer une cosmothéorie globale, capable d’interpréter le devenir planétaire actuel (quant à sa nature, ses fondements, ses paramètres, etc.), ni, a fortiori, l’intégrer à une vision cosmohistorique de la vie humaine.





On peut s’attendre à ce que la (re-)constitution cosmosystémique du devenir social se différencie des versions dominantes concernant la conception et la périodisation de l’histoire. Le temps cosmosystémique n’est pas linéaire, ce n’est pas le temps de l’histoire en général, il ne dépend pas de la «force», du «pouvoir» ou d’autres applications sectorielles de la politique ou de l’économie, etc. Le temps de l’histoire en général ne peut intéresser en soi le fait social ni, a fortiori, les relations de domination. Gengis Khan, Attila ou Charlemagne s’inscrivent dans un champ cosmosystémique différent de celui de Périclès, d’Alexandre le Grand ou de Constantin Paléologue. En d’autres termes, le temps de l’histoire est le temps de l’anthropos cosmosystémique. En cela, la périodisation de l’histoire doit comprendre comme composantes, d’une part, la succession des cosmosystèmes, et d’autre part, leurs mutations internes.

3. Le cosmosystème despotique. Despotisme privé et étatique

Le cosmosystème despotique se constitue, comme nous l’avons déjà signalé, sur la base des «sociétés de sujets». Dans le «type idéal» de société despotique, la relation sociale se construit en termes de propriété, ce qui signifie que, au-delà du despote, il n’y a pas de place pour l’exercice de la liberté.

Cependant, ce type absolu se diversifie en relation tant avec l’évolution interne du cosmosystème que par son croisement avec les paramètres du cosmosystème anthropocentrique.

Le cosmosystème despotique se manifeste sous deux expressions typologiques principales: le despotisme «privé» et le despotisme «étatique».

On entend par despotisme «privé» la formation sociale uniforme sur le plan de la propriété, et pour cela indifférenciée, dont les membres appartiennent au despote. On en a un exemple caractéristique avec le féodalisme du Moyen Âge européen occidental.

Le despotisme «étatique» est constitué de plusieurs fiefs privés sous l’égide générale de la propriété d’un despote central. Le despotisme «étatique» est donc pluraliste, il dispose d’une infrastructure «administrative» centrale et crée, par nature, les conditions de l’émergence d’enclaves anthropocentriques, capables d’assurer l’échange nécessaire entre les despotismes «privés» et de garantir la fonction «opérationnelle» du despotisme central. Ces enclaves sont une partie organique du despotisme mais ne caractérisent pas le système. L’exemple typique de despotisme «étatique» est ledit despotisme «asiatique».

La différence entre despotisme «privé» et despotisme «étatique» est capitale tant du point de vue de la typologie interne du cosmosystème en question que pour la civilisation qu’ils représentent. Le despotisme «privé» est par nature asphyxiant intellectuellement, alors que le despotisme «étatique» a fait surgir les premières grandes civilisations pré-anthropocentriques de l’histoire.

La dernière remarque sur le cosmosystème despotique est relative à sa rencontre avec le cosmosystème anthropocentrique. Cette rencontre a pour trait caractéristique l’infiltration des paramètres anthropocentriques (par exemple l’introduction de l’économie «chrématistique») et la consolidation des enclaves, qui ont pour base un développement relatif de la liberté. Cependant, il convient de distinguer entre les despotismes «étatiques» typiques, qui absorbent la dynamique de l’infiltration anthropocentrique, et ceux qui subissent en conséquence un sapement progressif de leurs fondations et acquièrent ainsi un caractère transitoire configuré sur le plan cosmosystémique. Au premier cas appartiennent la plus grande partie des anciennes sociétés despotiques (de type «étatique») qui ont coexisté avec le cosmosystème anthropocentrique hellénique, avec au premier rang les despotismes de l’arrière-pays afro-asiatique. Dans le second cas se classent principalement les sociétés despotiques européennes après leur réinscription dans la zone vitale du cosmosystème hellénique, c’est-à-dire à partir du début de la Renaissance jusqu’à leur métamorphose finale, au tournant des XIXe et XXe siècles[5].




4. Le cosmosystème anthropocentrique: hellénique, à petite échelle; ethnocentrique, à grande échelle

Le cosmosystème anthropocentrique désigne, comme nous l’avons vu, les sociétés qui ont pour signe la liberté au moins individuelle. Il apparaît avec un certain retard chronologique par rapport au cosmosystème despotique, mais dispose d’une unité organique et d’une cohérence plus actives pour ce qui est de son parcours évolutif.

Sa genèse peut être considérée comme le résultat d’une accumulation unique de conditions dans le périmètre de la Méditerranée centrale et orientale, avec pour épicentre la péninsule hellénique et ses archipels. Les éléments décisifs qui permirent ce résultat furent, d’une part, le haut développement du despotisme «étatique» sur les côtes afro-asiatiques de la Méditerranée et, d’autre part, la reproduction à la petite échelle sociale de la cité de cet acquis despotique, qui devait cependant acquérir une dynamique autonome sous le signe, finalement, de la transition anthropocentrique.

Nous distinguons deux manifestations essentielles du cosmosystème anthropocentrique en général: le cosmosystème anthropocentrique hellénique et le cosmosystème anthropocentrique ethnocentrique. La manifestation hellénique du cosmosystème anthropocentrique se construit à la petite échelle (avec pour fondement politéien la cité-État), alors que le cosmosystème ethnocentrique s’articule sur la grande échelle (avec pour fondement politéien correspondant l’État-nation). Le cosmosystème anthropocentrique ethnocentrique n’est pas nouveau: c’est une mutation typologique sur la grande échelle du cosmosystème anthropocentrique hellénique, pour ce qui est tant de sa genèse que de sa physionomie particulière. L’un, l’hellénique, coexistera sur Terre avec le cosmosystème despotique, contestant l’unicité qu’il détenait jusqu’alors. L’autre, l’ethnocentrique, marque la victoire finale de l’anthropocentrisme sur le cosmosystème despotique dans l’ensemble de la planète. Le cosmosystème anthropocentrique hellénique, pour sa part, représente un parcours évolutif achevé qui couvre l’ensemble du développement anthropocentrique supposé de l’individu; l’ethnocentrique est à peine sorti de sa phase de transition et vit le stade de sa construction anthropocentrique primaire.

Pour ce qui concerne plus particulièrement le cosmosystème anthropocentrique à petite échelle, son identité hellénique n’inscrit pas de prénotation ethnocentrique. Elle suggère simplement sa constitution à partir des sociétés helléniques, qui ont aussi constamment été, jusqu’à sa fin, sa matrice anthropocentrique.

Cette remarque signifie, d’une part, que l’hellénisme ne peut être défini de manière ethnocentrique selon le modèle moderne, c’est-à-dire comme «Grèce», mais comme cosmosystème; d’autre part, qu’au cosmosystème hellénique participe peu à peu, au sens où elles y ont été incorporées, une multitude d’autres ethnies qui ont été plus ou moins hellénisées. La qualité d’hellénisé peut suggérer son inscription dans le cercle culturel étroit (du «mode» de vie, de la langue, etc.) ou simplement sa participation à l’acquis anthropocentrique (de la vie, des institutions, de la connaissance, etc.), comme dans le cas des Arabes.

Le cosmosystème hellénique couvre une période qui va de l’époque créto-mycénienne – et, sur une orbite anthropocentrique complète, du VIIe siècle avant notre ère – jusqu’aux abords du XXe siècle. Cette constatation résonne curieusement dans le monde moderne, qui a pris l’habitude de lier la fin dudit «monde antique» à la chute de la Rome occidentale. Byzance, parce que postérieure, est rattachée comme Moyen Âge à la périodisation européenne occidentale, de même que les époques postérieures au dispositif de la transition occidentale du cosmosystème despotique au cosmosystème anthropocentrique[6].

La typologie évolutive interne du cosmosystème hellénique présente un intérêt unique, de même que ses connexions avec l’espace despotique environnant, qui a fonctionné largement comme sa «périphérie» vitale.

Nous distinguons deux grandes phases typologiques: statocentrique et œcuménique ou cosmopolitéienne. La phase statocentrique comprend le processus d’achèvement anthropocentrique à l’intérieur de la formation politéienne primitive de la cité-État. Le suivi de cette évolution, tant à travers le développement des paramètres du cosmosystème (l’économie «chrématistique», la quintessence sociale, la communication, etc.) qu’à travers les fermentations idéologiques et leurs correspondants pragmatologiques, se cristallise de manière éloquente dans le projet de liberté. Les dimensions individuelle, sociale, politique de la liberté se développent dans un ordre successif et en s’accumulant, obéissant à la logique de l’achèvement anthropocentrique du cosmosystème, initialement à l’intérieur de l’État.

Ce processus, pour ce qui est plus particulièrement de la liberté sociale, est lié à la transition de la société du travail (des citoyens) à la société du loisir (des citoyens), puis à la constitution, parallèlement à la société des citoyens, de la société du travail («marchandise»). En ce sens, l’antagonisme socio-politique change fondamentalement de contenu. Il devient: a) dualiste, en opposant la société des citoyens (la société du loisir) à la société du travail («marchandise» ou non politéien[7]); b) intra-social, en opposant la société des citoyens aux citoyens possesseurs du capital; c) inter-économique, au sens anthropocentrique primaire, en mettant face à face les possesseurs du capital et les possesseurs du travail (marchandise).

Pour ce qui est de la liberté politique, sa réalisation s’inscrit dans l’idée de la transition des systèmes de pouvoir – initialement la représentation primaire ou inférée, puis la pleine représentation – vers les systèmes de démocratie selon lesquels la politique est détachée – de même que le système politique – de l’État et est absorbée par le corps social lui-même. La démocratie se situe, en ce sens, aux antipodes des systèmes de pouvoir, tout comme l’autonomie par rapport à l’hétéronomie. La démocratie est définie comme le système socio-politique qui achève cumulativement la liberté dans toutes ses dimensions.

Il est intéressant de considérer les trois niveaux auxquels est conçue la politique. Dans le despotisme et à l’époque de la proto-constitution anthropocentrique, la politique est comprise comme équivalant à la force. La force constitue le système, et cela en termes de propriété. Dans l’anthropocentrisme primaire, la politique est définie comme une tautologie du pouvoir, au sens où elle se mue en un système qui consacre le dispositif du rapport de forces, mais l’intègre à un environnement normatif minimal où les membres du corps social jouissent de la liberté individuelle et d’un certain nombre de droits qui délimitent le cadre de leur présence sociale et politique. La phase de l’achèvement anthropocentrique envisage la politique comme le terrain de la liberté globale et, en cela, comme tremplin de la suppression de la force et du pouvoir à tous les niveaux de la vie socio-économique et politique.

Cette dynamique de l’achèvement anthropocentrique au sein de l’État ne se combine pas, au-delà de celui-ci, avec un processus analogue au niveau de l’ensemble du cosmosystème. Dans le despotisme, mais aussi pendant toute la période statocentrique du cosmosystème anthropocentrique, la politique au-delà de l’État est conçue comme pure force. Mais malgré cela, après la consolidation de l’anthropocentrisme à l’intérieur de l’État, les acteurs de la dynamique politique vont changer. Alors qu’auparavant, l’État souverain se présentait comme l’acteur quasi exclusif de la dynamique politique au-delà de l’État tout comme à l’intérieur de l’État, dans le nouvel environnement, les paramètres du cosmosystème s’émancipent et s’autonomisent. Non seulement ils ne voient plus dans l’État le foyer naturel de leur développement et de leur protection, mais ils l’envisagent comme un obstacle majeur à leur évolution et, au-delà, comme un «partenaire» concurrentiel dans la dynamique de l’environnement cosmosystémique.

Il était inévitable que ce développement cosmosystémique des paramètres anthropocentriques aboutisse à saper les fondements de la souveraineté étatique tout d’abord, puis, au fil du temps, du statocentrisme lui-même, préparant du même coup le terrain pour son dépassement.

La transition à l’œcuméné post-statocentrique va se constituer en deux phases: l’une avec l’intervention macédonienne dans les affaires grecques; l’autre, avec la conquête romaine de «l’Occident» et l’unification œcuménique du périmètre méditerranéen du système des cités. Dans les deux cas, la transition à l’œcuméné sera combinée à l’incorporation organique à celle-ci de la périphérie despotique voisine: l’asiatique par Alexandre, l’européenne par les Romains[8].

L’œcuméné, en tant que phase du cosmosystème anthropocentrique, marque un point de rupture de caractère typologique. La fin du statocentrisme ne signifie pas la fin des cités ni, a fortiori, des politéias (les systèmes socio-politiques) surgies lors de l’achèvement anthropocentrique à l’intérieur de l’État.


La transition à l’œcuméné s’inscrit comme le point de départ d’une nouvelle phase signifiante du développement anthropocentrique, au-delà de la formation politéienne primaire de la cité, dans le cosmosystème. Le rapport de forces qui distinguait l’approche de la politique entre les cités ou les autres acteurs du cosmosystème cède maintenant la place à un environnement réglementaire de type essentiellement de pouvoir, qui ressemble cependant amplement au type des sympolitéias.

Dans le même temps, la relation asymétrique entre la dynamique politique – produite par le «bloc hégémonique» et les paramètres autonomisés par rapport à la cité (l’économie, la politique, la communication, etc.) du cosmosystème – et le processus politique – qui est resté hermétiquement focalisé sur le régime politique de la cité – sera remplacée par la constitution de la cosmopolis.

La cosmopolis – la cité-État de l’œcuméné – compose l’environnement de la cosmopolitéia, qui finalement se cristallise dans la métropole (la cité capitale), qui fonctionne comme système politique central, et des politéias du système des cités du territoire. Dans ce nouveau cadre, le citoyen de chaque cité devient en même temps citoyen de la cosmopolis, cosmopolite. Mais la cité conserve jusqu’au bout sa compétence principale – comme une sorte d’État dans l’État –, annonçant d’ailleurs le principe de subsidiarité.

La période œcuménique du cosmosystème hellénique connaîtra des mutations internes significatives, avec des prolongements anthropocentriques qui iront au-delà de son espace vital historique immédiat.

En tant que système cosmopolitéien, elle passera par plusieurs phases jusqu’à s’équilibrer finalement au cours de la période byzantine. Byzance, en tant que cosmopolis, est en fait la version la plus achevée de la cosmopolitéia pour ce qui est du fonds anthropocentrique de la Métropole, mais aussi l’articulation en général de cette dernière avec le système des cités. Cependant, la dynamique centrifuge du système des cités ne s’éteindra jamais. À preuve, l’incapacité de la Métropole – de «l’État» central – à reconstituer la cosmopolis byzantine après sa dissolution en 1204, dissolution qui doit être imputée essentiellement à sa nature interne.



Une deuxième mutation aux conséquences fondamentales pour la cité, et avec des prolongements cosmohistoriques, concerne la question du travail. L’œcuméné imposera le passage de la société du loisir, que véhiculait l’idéologie démocratique, à la société partenariale. L’individu est réintégré au système de production pour participer à la redistribution du produit économique. Mais cette réintégration aura lieu non pas par le régime du travail dépendant mais en termes de co-partenariat. Entre les possesseurs de la force de travail ou entre ceux-ci et les possesseurs du capital se constitue une relation de co-partenarialité qui exclut la dépendance, c’est-à-dire l’expropriation de la liberté, dans un environnement où l’individu passe un contrat avec les sous-systèmes sociaux.

Ce système, une sorte de «politéia» dans le secteur de la production, conduira à long terme, notamment à l’époque byzantine, et en liaison avec la transformation de la cité indépendante en cité autonome, à l’abolition du travail servile ou «marchandise». De cette façon, toutefois, la liberté sociale se détachera de la liberté politique – dont elle était inférée au cours de la période statocentrique de la démocratie – et cheminera de manière autonome. Dans le même temps, la décomposition du système du travail «marchandise» au profit du travail co-partenarial fut un événement majeur, avec des prolongements cosmohistoriques[9].

Enfin, il est intéressant de remarquer qu’en fait, les cités vont conserver non seulement la totalité de leurs compétences dans des conditions d’autonomie, mais aussi les systèmes politéiens tels qu’ils avaient été achevés au cours de leur dernière phase statocentrique. La représentation partielle ou complète, l’oligarchie, la démocratie sont des constantes de l’œcuméné, y compris à l’époque byzantine et sous la domination ottomane. La question n’est pas ici celle de la certitude historique de cette opinion, mais l’obstination de la modernité à périodiser la cosmohistoire hellénique sur le modèle de la conjoncture européenne occidentale et à s’auto-définir comme supérieure, dans l’ensemble, au passé[10]. Cette attitude l’oblige à prétendre que la démocratie n’a été l’affaire que de deux siècles et, en tout cas, à négliger l’essentiel, à savoir que son espace historique, l’Europe occidentale, a constamment été la «périphérie» du cosmosystème hellénique. Le fait que cette «périphérie» devait plus tard dominer le monde n’annule pas sa place historique antérieure.

Le cosmosystème hellénique, sans toutefois le fonds anthropocentrique du pouvoir central[11], poursuivra son parcours historique après la prise de Constantinople en 1453, jusqu’aux abords du XXe siècle. La domination ottomane traduit le compromis historique qu’il fut obligé de passer avec le despotisme asiatique. Mais le conquérant ottoman, non content de ne pas porter atteinte à ses fondements, le servit pour des raisons qui lui étaient propres, avec cohérence.

5. Unité et synthèse du cosmosystème anthropocentrique à la petite et à la grande échelle

Une question d’un autre ordre concerne la relation du cosmosystème hellénique ou anthropocentrique à petite échelle avec son homologue moderne, à grande échelle. Comme nous l’avons déjà souligné, leur relation est organique et projective.

Cette relation est née, concrètement, à partir du moment où Byzance a réorienté son intérêt stratégique de l’Afrique et de l’Asie vers l’Europe. Cette réorientation eut pour conséquence l’intégration des Slaves à sa «périphérie» vitale et la réincorporation de la péninsule italienne essentiellement à sa zone cosmopolitéienne. En Italie, Byzance «implantera» des cités sur le modèle d’Alexandre en Asie, visant à y saper la féodalité et à développer le fonds anthropocentrique de ses sociétés. Par l’incorporation anthropocentrique de la péninsule italienne, Byzance ambitionnait en fait d’intégrer l’Europe transalpine à son espace vital économique.

Ainsi la Renaissance italienne est-elle une affaire intérieure de la cosmopolis byzantine, tandis que le transvasement des paramètres du cosmosystème anthropocentrique à petite échelle en Europe occidentale mobilisera la dynamique du passage de celle-ci du cosmosystème despotique au cosmosystème anthropocentrique ; passage qui toutefois sera réalisé non pas par le remplacement de la féodalité par les cités-États, comme en Italie, mais par sa mutation progressive, qui sera l’effet de l’implantation de la cité au sein du domaine féodal. La cité ou le koinon sera intégré organiquement au fief et transformé en communauté, c’est-à-dire en appendice du fief, tout comme les autres institutions et autres fonctions de la petite échelle anthropocentrique[12].

Malgré cela, la transition anthropocentrique de l’Europe occidentale et l’édification de la grande échelle cosmosystémique continueront à s’appuyer, jusqu’au début du XXe siècle, sur les données pragmatologiques du cosmosystème hellénique. L’adoption de la littérature grecque par le monde européen moderne ne s’explique que si l’on considère la place décisive occupée par le cosmosystème hellénique de l’œcuméné byzantine et post-byzantine dans sa transition anthropocentrique.

Le terrain social sera définitivement nettoyé des restes de la féodalité à la fin du XIXe siècle et dans les premières décennies du XXe, et ce nettoyage entraînera avec lui les institutions du cosmosystème hellénique, qui s’étaient entre-temps intégrées au domaine féodal et en avaient été une part constitutive. Dans le même temps toutefois, dans l’espace vital hellénique, l’échec de la palingénésie hellénique ou cosmopolitéienne, la constitution d’un État mort-né d’orientation ethnocentrique, appendice de l’hégémonie européenne semi-despotique, et l’avènement du mouvement nationaliste dans les Balkans conduiront à la décomposition progressive du cosmosystème hellénique ou anthropocentrique. Ce processus, qui s’achèvera finalement un siècle après la Guerre d’Indépendance grecque, en 1821, coïncidera avec la dissolution définitive du système des cités-États dans la péninsule italienne et du phénomène communal en Europe.

Dans ce cadre, il était inévitable que l’anthropocentrisme à grande échelle cosmosystémique reparte à zéro, puisque ni les conditions pragmatologiques (économiques, sociales, communicationnelles, etc.), ni les conditions culturelles ou idéologiques (le développement de la liberté, par exemple) n’étaient réunies pour retenir ou absorber l’acquis anthropocentrique du monde hellénique. Les relations de propriété, la place du capital et du travail dans le processus de production, l’idéal de la société du travail, la structure même de la politique, tout cela suggère une époque primaire de la construction anthropocentrique, avec pour projet la liberté individuelle et son soutien par un corps de droits socio-politiques. Une époque qui ne concerne finalement que le noyau de l’avant-garde – le «centre» – puisque le reste de la planète, la «périphérie», hésitait à cette même époque entre la décomposition despotique et la proto-construction anthropocentrique.

Cette supériorité du «centre» anthropocentrique moderne sur l’anthropocentrisme hellénique pour ce qui est de l’échelle cosmosystémique, et sur sa propre «périphérie» pour ce qui est de son acquis anthropocentrique, lui insufflera une nouvelle confiance en lui qui se cristallisera sous forme de rupture avec le passé. Ainsi cultivera-t-il le sentiment de sa supériorité anthropocentrique et de l’impossibilité de sa rencontre comparative avec le précédent historique.

Sans aucun doute, cette arrogance de la modernité doit être aussi attribuée à son manque de maturité gnoséologique. Manque de maturité qui va de pair avec l’incapacité à concevoir l’enjeu global de l’achèvement anthropocentrique (ses paramètres mais aussi le projet même de la liberté) et à construire les catégories gnoséologiques et méthodologiques adéquates à l’aune desquelles serait évalué le phénomène social[13]. Manque de maturité qui se focalise sur l’absence de perception globale, cosmosystémique, du fait historique.

Aux antipodes, l’approche cosmosystémique affirme que la rencontre du paradigme hellénique et du paradigme anthropocentrique ethnocentrique en termes d’analogie comparative est non seulement possible, mais est la condition sine qua non de la compréhension globale de la vie humaine. Si l’on prend précisément pour ligne directrice cette opinion, on peut aboutir à la conclusion sûre que l’époque anthropocentrique de la modernité correspond par analogie à la période primaire de la cité du VIIe et du VIe siècle avant notre ère. En ce sens, la supériorité de la phase homologue de la grande échelle par rapport à la petite échelle hellénique ne permet pas de déduire l’argument que la première est globalement supérieure au devenir évolutif global de la seconde. À tout le moins, la modernité est statocentrique et non œcuménique, structurée sur le pouvoir et la propriété et non démocratique, et elle vit donc le système que dicte la liberté individuelle univoque dans le cadre de l’État. Par conséquent, il manque la phase d’achèvement anthropocentrique à l’intérieur de l’État, de même que toute prénotation de développement anthropocentrique au niveau post-statocentrique de l’œcuméné.

Cette appréciation comparative du caractère primaire de la période anthropocentrique sur la grande échelle et la démonstration de l’achèvement anthropocentrique du cosmosystème hellénique ne visent pas à un retour à la petite échelle cosmosystémique. L’édification de la grande échelle cosmosystémique est non seulement donnée mais représente une évolution positive capitale dans le sens du progrès.

Mais dans le même temps, l’approfondissement de la nature cosmosystémique du phénomène social permettra à la modernité d’acquérir l’auto-connaissance nécessaire à propos de son stade anthropocentrique, rendra possible sa rencontre avec l’histoire sur de nouvelles bases, mènera à une nouvelle périodisation du devenir évolutif de l’être humain et, par voie de conséquence, facilitera l’élaboration d’un projet pour l’avenir qui réconciliera la notion de progrès avec le développement anthropocentrique.


[1] In Le cosmosystème hellénique. t. A` La période statocentrique, Éd. Sideris, Athènes, 2006, pp. 25-65.

[2] De même, la cité est identifiée à l’économie monétaire, tandis que le domaine féodal ignore formellement la monnaie et les activités inhérentes à celle-ci. D’autre part, le cas de Byzance, d’un côté, est assimilé à l’histoire de l’économie monétaire, c’est-à-dire à un système qui se situe aux antipodes de la féodalité, et de l’autre, est classé comme Moyen Âge, à savoir comme féodalité. Il est clair que le cas de Byzance soulève d’autres questions très importantes, telles celle de la religion et de ses différences avec celle du Moyen Âge occidental. Pour une première approche, voir G. Contogeorgis, «La modernité, la tradition et le projet de progrès», dans Laokrati Vassi (dir.), Tradition et modernisation en Grèce au XXIe siècle, Athènes 2006. [Nos ouvrages cités dans ces notes sont en grec]

[3] Sur cet argument, son caractère non scientifique et ses prolongements dans l’interprétation de la conception du monde et de l’évolution, voir notre réponse au fondateur de la théorie, Samuel Huntington, reproduite dans plusieurs pays (France, Portugal, Espagne, Italie, etc.): G. Contogeorgis, Le clergé. La mutation despotique de l’Église helladique, Terzo Group, Athènes 2000 (et plus spécialement le chapitre intitulé «Civilisation ‘religieuse’ ou cosmosystémique?», p. 265-348.

[4] Il est à noter également que la science moderne introduit surtout des appellations de phénomènes qui n’ont aucun rapport avec leur nature. Des notions telles que modernité, tradition, mondialisation, modernisation, etc., sont en réalité dépourvues de contenu. En outre, leur lien avec le progrès n’est pas défini, ni, par extension, puisqu’il est question de sociétés humaines, avec la liberté. Un sens leur est conféré par référence au modèle de la modernité, et notamment de ladite société «occidentale», et elles sont évaluées en conséquence. Aux antipodes, un approche strictement scientifique s’occuperait de la constitution de catégories conceptuelles et gnoséologiques plus larges, pour qu’elles deviennent la base de mise à l’épreuve des différents phénomènes, dont celui de l’époque moderne.

[5] De même, le monde hellénique des temps créto-mycéniens.

[6] Cette périodisation passe également sous silence le fait que le cosmosystème despotique a été la constante historique du reste (asiatique, etc.) du monde jusqu’au XXe siècle.

[7] Nous entendons par ce terme le travail dépendant ou salarié que fournit le citoyen dans le cadre du processus économique.

[8] La relation qui s’instaure entre le cosmosystème hellénique ou anthropocentrique à petite échelle et le cosmosystème despotique qui l’entoure présente un très grand intérêt. Cette coexistence, pendant toute la durée de vie du cosmosystème hellénique, introduira des relations qui influenceront tant les références internes de l’anthropocentrisme que la logique du despotisme. L’examen de ces relations aux différentes phases du cosmosystème hellénique donne la possibilité de discerner le processus même de transition vers la souveraineté planétaire univoque du cosmosystème anthropocentrique à l’époque moderne.

[9] Nous envoyons en introduction à nos études: «Travail et liberté. Prolégomènes à une théorie cosmosystémique du travail», dans Koutra (dir.), Travail et métier, Athènes 1998, 2002, p. 66-90, et Citoyen et cité. Notion et typologie de la «politéienneté», Athènes 2003, p. 159 et suiv., 197 et suiv.

[10] Pour le cadre pragmatologique et les conditions intellectuelles qui ont conduit la modernité à se transformer, de simple phase anthropocentrique, et même extrêmement primaire, en une idéologie (dogmatique) et, au-delà, en science, voir G. Contogeorgis, «La modernité, la tradition et le projet de progrès», op. cit.

[11] Cette réalité ne se produit pas pour la première fois dans le cosmosystème hellénique. La dégénérescence despotique du pouvoir central se rencontre aussi aux temps hellénistiques tardifs et pendant la plus grande partie de la période romaine.

[12] Voir à titre d’introduction nos études: «Les cités/koina sous la domination ottomane», Ta Istorika 153/2002, p. 6-4; «Le cosmosystème hellénique dans l’œcuméné tardive. Les cités/koina de la domination ottomane», dans J. Alonso Aldama (dir.), Olga Omatos. Taboula Gratulatoria, Vitoria-Gasteiz, 2006; «Byzance comme paramètre du cosmosystème hellénique et l’Europe occidentale», dans M. Morfakidis (dir.), Constantinopla: 550 anos desde su Caida, Grenade (2003) 2006.

[13] Pour plus de détails, voir G. Contogeorgis, «La modernité, la tradition et le projet de progrès», op. cit.

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